ELECTION PRESIDENTIELLE IRANIENNE: UNE CONTESTATION TRES OCCIDENTALE
Depuis les mensonges qui ont justifié les invasions meurtrières américaines en Iraq et en Afghanistan, on est obligé de considérer avec beaucoup de retenues tout ce qui peut être dit ou affirmés chez nous sur les pays qui sont dans le collimateur des alliés de l'axe du bien judéo-chrétien occidental.
En effet, à force de s'employer grossièrement et souvent violemment à installer leurs conceptions personnelles de la démocratie partout dans le monde, y compris pour leurs propres populations, ils suscitent le doute sur leur sincérité et la suspicion sur leurs vrais objectifs, au point qu'un nombre grandissant de citoyens occidentaux considèrent chacun des actes ou chacune des déclarations des dirigeants politiques qu'ils inspirent comme une manipulation, mise en scène par les médias officiels qu'ils contrôlent.
C'est ainsi qu'en France en particulier, la manière avec laquelle ont été présentées et traitées politiquement et médiatiquement les dernières élections présidentielles en Iran et notamment les contestations qui les ont suivies, n'a pu éludé le goût particulier de cette manipulation, au moins en raison de l'usage stéréotypé du discours habituel réservé aux "pays autoritaires" où "la liberté est oppressée" par un régime "dictatorial religieux intégriste" qui est "un danger pour le monde libre" parce qu'il est "un ennemi d'Israël dont il veut la mort".
Quoi que l'on pense ou comprenne de l'histoire le l'Iran, des raisons de sa révolution islamique, de sa situation sociale interne et de l'exercice du pouvoir par ses dirigeants actuels, on ne pourra pas gommer le fait que les positions et les déclarations de son président aient une cohérence certaine vis-à-vis de la situation au Proche Orient qui gênent au plus haut point les ambitions des pouvoirs politiques et économiques américains, israéliens et de leurs alliés, dont la France maintenant.
De la même manière, on appréciera les raisons qui poussent les "démocrates" à agiter la peur du spectre terroriste, lorsque le même président Ahmadinejad (comme ses concurrents électoraux) met en doute leur droit et leur légitimité à interdire le nucléaire iranien en rappelant l'usage qu'en ont fait les Etats-Unis sur des populations civiles innocentes et sans défense à Hiroshima et Nagasaki ou qu'il dénonce (avec l'URSS, le Japon ou le Vénézuela) la main de la CIA et du Mossad derrière l'effondrement du WTC.
De ce fait et sans céder à l'angélisme manichéen qui n'a pas lieu d'être vis-à-vis du régime iranien, il est intéressant de découvrir que les résultats de l'élection présidentielle ne sont certainement pas aussi corrompus que ce que l'on nous en dit, ne serait-ce qu'à la vue d'un sondage réalisé en Iran 3 semaines avant le scrutin par un institut américain qui donnait une prévision conforme à ce qui est advenu.
Quant aux contestataires, un excellent article de James Petras nous montre que les politiques et les médias occidentaux ont construit leurs analyses sur l'amplification des attentes de libéralisme d'une partie des classes bourgeoises en laissant de coté les motivations populaires d'égalité et de partage des classes inférieures majoritaires, notamment dans les campagnes, dont les votes ne pouvaient se porter que sur le président populiste en exercice.
De son coté, un article de Thierry Meyssan qui connaît bien la réalité iranienne et les arcanes cachées de la manipulation états-unienne, démontre comment et pourquoi la CIA a provoqué la confusion en inondant les iraniens de messages SMS contradictoires (1) et a répandu à Téhéran la nouvelle d’une possible fraude électorale qui a poussé dans la rue les partisans de l’ayatollah Rafsandjani contre ceux de l’ayatollah Khameneï. Dans un autre article bien documenté, il nous apporte un éclairage plus profond sur l'usage de la stratégie des "révolutions colorées" dont la "révolution verte" iranienne est un avatar qui a échoué.
A elles seules ces analyses donnent suffisamment d'éléments d'appréciation pour que nous ne soyons pas surpris du fait que les experts manquent de preuves pour conclure à une fraude électorale.
Il y a donc fort à parier que cette contestation ne soit une fois de plus le fruit d'une manipulation américaine, cette fois-ci version Obama, suscitée auprès des élites occidentalisées locales, héritières de la classe iranienne bénéficiaire du précédent régime du Chah Mohammad Reza Pahlavi, installé par la CIA et le MI6 britannique au cours de l'Opération Ajax, puis renversé par la révolution islamique de Khomeyni en 1979.
A la lumière de ce second point, on comprendra mieux pourquoi nos médias ont choisi son fils Reza Pahlavi - formé aux USA où il réside depuis la chute de son père - pour incarner cette contestation sociale des élites occidentalisées, forcément minoritaires, plutôt que les concurrents du national-populiste Ahmadinejad dont le principal est certes un libéral mais aussi un partisan de l'acquisition du nucléaire militaire et fondamentalement pas bien plus conciliant avec d'Israël que son vainqueur.
Paul-Vincent
PAQUET - ©
Juillet
2009
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(1) Nous avons ainsi le sens et l'explication de cette fameuse "révolution Twitter" dont les médias ont fait la promotion en oubliant d'ailleurs que l'usage massif de l'Internet et des SMS par la population pouvait être incompatible avec l'idée qu'ils nous donnaient d'un pays couvert par la chape de plomb d'un régime autoritaire.
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