Actualisée
le 7 vril 2011
Nous avons vu qu'il n'a pas fallu attendre longtemps pour que la notion de terroriste s'élargisse jusqu'au principe actuel qui fait de chaque citoyen un suspect potentiel. Aussi, l'annonce de la volonté de "confier" les membres des "mouvances anarchistes" aux juges d'exception dont les prérogatives et le travail sont en marge de l'Etat de droit, augure d'une nouvelle étape conduisant à la fin du droit républicain pour chaque citoyen.
En l'occurrence, l'intérêt soudain porté à cette "mouvance anarchiste" ne peut que surprendre, ne serait-ce qu'en raison de l'hypothèse de ses supposées intentions terroristes qui la discréditeraient de facto de se réclamer de la pensée libertaire naturelle. Au-delà de ce constat sur l'amalgame sémantique entre libertaires, anarchistes et terroristes (1), on peut s'interroger sur la réalité du "danger" pour la société d'une "mouvance anarchiste" dont les effectifs probables ne doivent pas excéder une poignée de militants officiels au discours généralement plus conceptuel que pragmatique.
Par voie de conséquence, on sera tenté en premier lieu de voir au travers de cette annonce la volonté de jouer une nouvelle partition sur le registre de la peur par la suggestion de l'existence de nouvelles "bandes à Bonnot" qui permettrait de décliner une variante du concept terroriste dont le bien fondé s'essouffle.
Mais éclairé par l'expérience de ce qu'a permis le prétexte du terrorisme pour mettre la société entière sous l'emprise de Big Brother et chaque citoyen sous le coup de lois liberticides, on suspectera aussi et surtout un nouveau prétexte à la fois plus subtil et plus précis qui ouvre sur l'usage d'un amalgame dont beaucoup de citoyens pourraient être rapidement les victimes.
Un petit rappel est donc nécessaire pour comprendre un peu mieux.
La pensée libertaire: principal ennemi du système
Le système politico-religieux dans lequel l'humanité vit depuis des siècles a toujours été fondé sur l'organisation de la dualité entre pouvoir et contre pouvoir. Que cette dualité soit organisée comme dans la démocratie ou qu'elle serve de répulsif pour justifier une dictature, ou bien qu'elle permette de mettre en opposition les troupes des différents prophètes successifs, elle reste la matrice nourricière et le cadre des actions des pouvoirs actuels et de leurs futurs remplaçants, en même temps qu'elle fournit la part d'espoirs utiles à l'attente de jours meilleurs. C'est ainsi que l'histoire du monde civilisé s'est écrite sur ce système de fond dont les motifs de forme - parfois diamétralement opposés - ont permis de maintenir l'illusion d'une humanité écrivant de manière autonome son histoire et décidant de son destin.
Dès lors, on comprendra mieux que du point de vue du "système" - et donc de ceux qui ont intérêt à le faire vivre - il est indispensable que les oppositions internes s'expriment sans remettre en cause la règle du jeu, les limites du damier et... les arbitres suprêmes.
Si l'accélération des deux derniers siècles a généré plus de malheurs et de morts que les 6000 ans précédents, la compression du temps donne aussi l'occasion de mieux voir sur deux ou trois générations cette matrice constante qui a animé l'horreur de régimes en apparence aussi différents que le nazisme hitlérien, les marxismes stalinien et maoïste ou l'actuel néo-conservatisme américain et ses associés. De ce fait, le système suprême se dévoile aux yeux de plus en plus d'humains un peu partout dans le monde au fur et à mesure que tombent les illusions de la légitimité des dieux des religions et des maîtres de nos sociétés derrière lesquelles il se cache et dont il est le marionnettiste.
Or c'est justement ce dont s'affranchit la
pensée libertaire (2)
dont le slogan
réducteur "Ni dieu, ni maître" résume l'opposition
radicale... au système et la volonté
d'une
humanité libre. Utopique ou pas, il n'en reste pas moins
que le citoyen qui délégitime
l'allégeance aux "bergers" de
l'humanité et aux "gestionnaires" des
sociétés rompt les charmes
du système.
Voyez-vous où j'en
viens ?
Tout citoyen qui commence à comprendre
que les
oppositions sont générées,
voulues, entretenues et causées par ceux qui ont
intérêt à dominer l'humanité
en la divisant
et en la soumettant à leurs "règles
du jeu", devient - sans en mesurer
l'ampleur - le pire ennemi du système.
Ne serait-ce donc pas en prévision des conséquences de cette potentialité qu'est mis en place un cadre juridique et policier spécifique à la pensée libertaire permettant le moment venu d'être élargi à tout citoyen revendiquant... la liberté ?
Des lois spéciales pour les anarchistes qui préparent le traitement réservé aux hommes libres
Beaucoup d'indices montrent qu'à mesure où l'étau orwellien se resserre sur l'humanité, la perception grandissante de la réalité fondamentale du système se traduit par le rejet de l'illusion de la délégation de souveraineté individuelle et collective. C'est ainsi qu'à l'image des anti mondialistes qui renvoient dos-à-dos les deux facettes pro et alter de l'uniformisation globale, la pensée libératrice - quelle que soit l'appellation qu'on lui donne - naît dans l'esprit de plus en plus de citoyens.
Il n'est donc pas besoin de faire un dessin pour saisir l'importance que représentent ces "obstacles" pour la réussite de l'avènement du nouvel ordre mondial qui se construit à marche forcée et dont le moins que l'on puisse dire est qu'il apparaît comme un système global niant la liberté individuelle et collective.
Ainsi, de la même manière qu'il a été aisé en quelques années de faire passer une infraction au stationnement pour de la délinquance, puis de la délinquance pour du terrorisme, ne sera t'il pas plus facile encore d'assimiler la revendication de la liberté pour l'appartenance à une mouvance libertaire puis à de l'activisme anarchiste et de le traiter comme du... terrorisme dont les lois de répression sont déjà en place ? En d'autres termes, les dirigeants politiques qui nous ont déjà montré leurs aptitudes à user de la manipulation pour mettre la société en coupe-réglée, hésiteront-ils à poser l'étiquette "anarchiste" sur tout ce qui remet en cause leur légitimité et le bien fondé de leur pouvoir et des règles qu'ils imposent à l'humanité ?
C'est
manifestement dans cette logique qu'il convient de ranger les
instructions
données par Madame Dati aux parquets afin de soustraire
au droit commun les membres de la "mouvance
anarchiste"
et dont l'avenir
nous montrera certainement qu'elles préparaient au
"traitement" spécial des rebelles, c'est à
dire des citoyens qui n'accepteront plus de laisser leur vie
d'humain à la direction des "bergers" de
l'humanité et des "gestionnaires" de la
société.
Lire aussi mon commentaire d'actualité autour du
sujet sur le
Décret du 11 mars 2011:
Décret
du 11 mars 2011: Surveillance totale et permanente de l'Internet privé
définitivement installée avec en prime la manipulation directe de nos
connexions
NB: Merci de signaler les liens inactifs. Une copie PDF de ceux-ci vous sera adressée.
(1)
La
technique de l'amalgame est une manipulation classique
destinée à discréditer un courant de
pensée, un mouvement ou des individus par association avec
des concepts ou des actions inacceptables. L'histoire montre que de
telles actions "répulsives" ont souvent
été crées ou suscitées pour
être associées puis "labellisées" par
le
pouvoir et les médias de l'étiquette de
ce que l'on voulait marginaliser ou
discréditer, comme par exemple les casseurs
introduits à dessein dans des manifestations. Il convient
donc de ne pas confondre la pensée libertaire et la
pensée anarchiste, la pensée anarchiste
et l'activisme violent visant un pouvoir, tout comme il n'y a
aucun lien cohérent entre le terrorisme visant des
innocents et une quelconque lutte de libération.
(2)
La pensée libertaire est avant tout une expression
individuelle qui n'est généralement pas le fruit
d'un enseignement mais d'une disposition humaniste personnelle
et spontanée confrontée à la
réalité négative de ce que
génèrent les pouvoirs sur les individus et la
société.
Elle n'a donc rien à voir avec l'anarchisme
à la dynamite ("produit antibourgeois")
d'un Ravachol et de sa "marmite
explosive", de l'assassinat de
Sadi Carnot en 1894 ou des attentats contre l'Assemblée
nationale, la gare Saint-Lazare et les bâtiments publics dans
la France de la fin du XIX° siècle. Pas plus
d'ailleurs qu'avec les braquages violents des malfrats
rebaptisés "anarchistes
illégalistes" qui s'abritaient pour leur
propre compte derrière la théorie de la "reprise individuelle"
que les anarcho-syndicalistes du début du
XX° siècle appliquaient au monde du
travail.
Exclusivement
humain, viscéralement anti-raciste,
profondément pacifiste et pacifique, dénonciateur
sans concessions des
injustices et des usurpateurs, ennemi de tous les asservissements et de
tous les "directeurs de consciences" religieux, politiques,
économiques ou moraux, jaloux de sa liberté et de
celle des autres, rebelle aux manipulations, le libertaire est plus
proche du "guerrier
pacifique"
- parfois à "grande gueule" - que de
l'intellectuel théoricien d'une liberté
conceptuelle.
Il se rencontre beaucoup plus dans les
couches populaires que dans les cercles de pensées
où l'anarchisme a été
théorisé.